Pierre Perrin, Le Bonheur
À Gabrielle et Philippe Debiève
Tout
était mouvement, l’écume de la mer, le ciel tendu
de veines invisibles.
Une voix grave avec de lents emportements avait
creusé la tendresse depuis la tête jusqu’aux chevilles.
Elle l’avait emportée vers des rivages inconnus.
Le malheur
sur la meule ne s’aiguisait plus. Le temps était loin où
la bouche pleine de graviers ne se nourrissait que de larmes.
Un parfum
avait fait frissonner sa narine, un doux éclat de voix la retournait
encore.
Comme le vent enchante l’incendie, des silences attisaient
les aveux retenus. Les mots jamais dits chargeaient tous à la fois.
L’automne rosissait, comme elle appelait la vendange.
Déjà,
sur la grève du temps, une ardente faiblesse les élevait
l’un l’autre, qui fécondaient ensemble le rêve
de l’éternité.
Pierre Perrin, Des jours de pleine terre, 2002